L'amertume des «oubliés» du prix Nobel

Lê Đoàn Thanh Lâm

Senior Member
Le Français Jean-Claude Chermann et l'Italien Nicola Cabibbo ont-ils été victimes de la règle désuète qui empêche de décerner le prix Nobel à plus de trois chercheurs dans la même discipline ? La polémique enfle.

Marc Mennessier
08/10/2008

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Un comité de soutien à Jean-Claude Chermann (ici au milieu) a demandé au jury du prix Nobel, accordé la veille en médecine à Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier pour la découverte du virus du sida en 1983, de «réparer un regrettable oubli».

Faut-il changer les règles d'attribution du prix Nobel ? Rarement le palmarès de cette distinction, la plus prestigieuse au monde, n'aura été autant contesté que cette année. Mardi soir, un comité de soutien au Pr Jean-Claude Chermann, écarté du prix Nobel de médecine (accordé la veille à Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier pour la découverte du virus du sida en 1983) a demandé au jury du prix Nobel de «réparer un regrettable oubli».

Selon ce comité, qui compterait déjà une centaine de membres dont plusieurs médecins, «il n'y a pas deux mais trois codécouvreurs officiels du virus du sida». À savoir Barré-Sinoussi, Montagnier et Chermann.
Seulement voilà : dans ses statuts, le jury de l'Académie royale suédoise des sciences ne peut décerner le prix qu'à trois lauréats, au maximum, dans chaque discipline. Or cette année le Nobel de médecine a également été attribué à l'Allemand Harald zur Hausen, pour ses travaux sur le virus responsable du cancer de l'utérus. Les membres du comité Nobel ont-ils été contraints de «sacrifier» l'un des trois codécouvreurs du VIH pour respecter le numerus clausus ? Et si oui sur quels critères ?

Car il ne semble pas que Jean-Claude Chermann ait joué un rôle moins important que ses deux collègues. Bien au contraire. «Les deux premiers noms cités» dans l'article annonçant en mai 1983 la découverte du VIH, dans la revue américaine Science, «sont ceux de Barré-Sinoussi et de Chermann», rappelle son comité de soutien. Or, dans un article scientifique, cette place est traditionnellement réservée à «ceux qui ont réellement travaillé sur le projet décrit dans l'article». Le nom de Montagnier vient en dernière position, qui est «régulièrement celle du chef du laboratoire». En outre, rappelle le comité, «le Pr Chermann est cité dans tous les brevets comme codécouvreur».

Tout en félicitant ses deux collègues et en se disant «très fier d'avoir contribué» à ce Nobel qui est «une reconnaissance de la découverte de Français», l'intéressé a confié, mercredi, à l'Agence France Presse (AFP) qu'il « était vraiment une pièce maîtresse» au sein de l'équipe de l'Institut Pasteur qui a identifié le VIH. «C'était dans mon labo. C'était moi le rétrovirologue», a-t-il ajouté en précisant qu'ils étaient «trois à défendre la découverte devant les Américains» lorsque l'équipe du Pr Robert Gallo en a revendiqué, à tort, la paternité un an plus tard.

Revoir des règles vieilles de plus d'un siècle


Cette funeste «règle des trois» semble avoir fait une seconde victime cette année, en la personne de l'Italien Nicola Cabibbo, «oublié» lui aussi du prix Nobel de physique décerné mardi midi à deux Japonais, Kobayashi et Maskawa, et à un Américain d'origine nippone, Yoichiro Nambu.
«Cabibbo, a compris, en premier, le mécanisme du phénomène des quarks (particules élémentaires constitutives des protons et des neutrons) qui a ensuite été développé par les physiciens primés», s'est insurgé, le soir même, le président de l'Institut italien de physique nucléaire, Roberto Petronzio.

De fait, la fameuse «matrice CKM», qui rend compte du changement de certaines propriétés des quarks dans le modèle standard de la physique des particules, fait bel et bien référence aux initiales des trois savants : Cabibbo, Kobayashi et Maskawa. Les jurés Nobel auraient-ils perdu le «C» en cours de route ?

Ce n'est pas la première fois, depuis sa création en 1901, que l'attribution d'un prix Nobel est contestée. La chercheuse américaine Rosalind Franklin dont les photographies aux rayons X avaient permis à Watson et Crick de déterminer la structure en double hélice de l'ADN ne figure pas au palmarès du Nobel de médecine attribué en 1962 à ses deux éminents collègues. Plus près de nous, le biologiste français, Dominique Stehelin, a demandé en vain à l'Académie de Stockolm de reconnaître son rôle déterminant dans la découverte de «l'origine cellulaire des oncogènes rétroviraux» qui valut aux Américains Michael Bishop et Harold Varmus d'être primés en 1989. Mais, c'est la première fois que deux contestations surviennent la même année à deux jours d'intervalle. Du coup, il est permis de s'interroger. N'est-il pas temps pour le jury des Nobel de revoir ses règles d'attribution vieilles de plus d'un siècle ?

Pourquoi se limiter à trois lauréats à une époque où la science est de plus en plus souvent pratiquée par des équipes pluridisciplinaires composées de dizaines voire, parfois, de plusieurs centaines de chercheurs, comme c'est le cas notamment en physique des particules ?

Source: http://www.lefigaro.fr
 

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